« En même temps qu’il fait la mode, le créateur s’invente sa vie », se plaisait à dire la grande couturière française Sonia Rykiel. L’adage va comme un gant à Achille Maramotti, fondateur en 1951 de la célèbre maison de prêt-à-porter italienne Max Mara. Toute sa vie, le « Patriarche » comme on l’appelle ici aura conjugué passion pour l’art et fashion design. L’idée de créer une collection publique d’art contemporain lui vient dès les années 60. « Il était un grand ami des artistes. Il a souvent côtoyé leurs ateliers, comme celui de Claudio Parmiggiani, raconte Françoise Steyaert, en charge des relations publiques de la collection. Au départ, les œuvres qu’il achetait étaient exposées dans les bureaux de l’entreprise pour cultiver et favoriser la créativité des collaborateurs. Puis, la collection s’est considérablement agrandie jusqu’à devenir un ensemble majeur qui retrace toutes les grandes tendances de la période de l’après-guerre jusqu’au début des années 2000. »
Expressionnistes abstraits, art informel, œuvres italiennes protoconceptuelles, Pop Art romain, Arte Povera, Transavanguardia… la Collezione Maramotti, aujourd’hui riche de plusieurs centaines d’œuvres, balaye l’ensemble des courants italiens et internationaux comme le néo-expressionnisme allemand ou la Nouvelle Géométrie américaine. Et l’écrin est sur mesure. Situé à Reggio d’Émilie, le spectaculaire bâtiment de verre et de béton, bijou d’architecture brutaliste et de design industriel, est l’ancien site de production Max Mara. « Au décès du Patriarche en 2005, ses trois enfants ont décidé d’exaucer l’un de ses vœux qui était de pouvoir faire profiter sa collection au plus grand nombre et de partager sa passion pour l’art avec le grand public, ce qui correspondait également au moment où les bureaux de Max Mara ont déménagé, précise Françoise Steyaert. Une fois vidé, ce bâtiment avait un potentiel très intéressant pour exposer de l’art en particulier des œuvres monumentales grâce à la l’espace. »
Dirigée depuis 2021 par Sara Piccinini, la Collezione Maramotti expose 200 œuvres de façon permanente sur deux étages. Les espaces du rez-de-chaussée sont réservés aux expositions temporaires. La collection est elle-même un « travail en cours » qui se décline également hors les murs, notamment au travers de sa programmation et de son mécénat.
Après l’exposition « Manuele Cerutti » du 9 mars au 28 juillet 2024, la Collection exposera la photographe Silvia Rosi en écho avec le European Photography Festival 2024 qui se déroule dans la ville de ReggioEmilia, du 28 avril au 28 juillet 2024. A l’automne, la collezione accueillera une performance chorégraphique, in situ, dans le cadre du festival de la danse contemporaine de la ville de Reggio Emilia du 21 au 24 novembre 2024. « La Collection entretient des relations très fortes avec la ville. C’est un soutien important. Chaque année, le festival de photographie se déroule dans des endroits emblématiques de la ville : palais, cloîtres et autres haut-lieux de la ville. C’est un festival très qualitatif, animé et qui attire de nombreux visiteurs de l’étranger », dit Françoise Steyaert. Décerné tous les deux ans, le Prix d’art Max Mara pour les femmes, en collaboration avec la galerie Whitechapel, récompense des artistes femmes mid career qui vivent et travaillent au Royaume-Uni. L’artiste lauréate est invitée à réaliser un projet lors d’une résidence de six mois en Italie. L’œuvre est ensuite exposée à la Whitechapel Gallery et à la Collezione Maramotti, qui l’acquiert. Parmi les heureuses élues, on retrouve ainsi Margaret Salmon, Hannah Rickards, Andrea Büttner, Laure Prouvost, Corin Sworn, Emma Hart, Helen Cammock et Emma Talbot. Dernière en date, Dominique White sera exposée à la Whitechapel Gallery en juillet 2024 et ensuite à la Collezione Maramotti à partir du 26 octobre 2024. Chez Max Mara, on célèbre toujours l’art, les femmes et la mode.